Catherine Simon, extrait d’éloge prix SACD (Brutalis)

Catherine Simon

Une tache claire dans le magma noir : un genou isolé.

Une ligne anguleuse dans le magma noir : son bras, ciselé, son coude, comme un angle abrupt rattaché à nulle part.

Une masse noueuse dans le magma noir : son dos, jeu de muscles, nœuds de muscles, frétillement noueux de muscles sous la peau.

Fascination face à cette conscience aiguë de ses moindres angles et articulations.

L’émotion naît de cette perfection millimétrée, de cette précision implacable qu’elle impose à chaque espace de son corps pour une création indiscutablement étonnante, époustouflante de rigueur.

Avec tout le temps ce noir : fusain, poussière du dessin au fusain, de la terre, de la saleté, une précision infinie pour donner une impression de trace sale, un travail prodigieux sur la lumière pour garder, évoquer, conserver ce côté «dessin sale». J’ai toujours détesté le fusain, les dessins au fusain, qu’il fallait fixer… Et là, j’ai retrouvé cette impression de chose non fixée, d’un dessin qui s’effrite, qui tache.

Mélange surprenant de précision et de fuite (de flou),

La lumière pour mieux valoriser la poussière,

Le noir qui déborde, l’ombre qui rogne,

Une impression d’encre qui coule, d’encre qui déborde,

La peau salie balayée chichement par la lumière.

Comme un léger coup de pinceau de lumière pour une tentative furtive de sortir du noir et y rentrer aussitôt.

Et parler d’elle est parler aussi d’humour, de son imperturbable humour.

Humour, sa façon de revenir soudain avec un sourire impeccable, blanc figé sortant de la noirceur,

Humour, sa silhouette en robe longue, impeccable, pour des gestes millimétrés, d’une élégance étourdissante.

Je n’ai vu qu’une fois ce spectacle, m’en souvenir m’a donné l’envie de le revoir, j’espère qu’il se rejoue. Qu’il rejouera.